La continuité pédagogique, entre injonctions contradictoires et préparations locales

mardi 6 octobre 2020

« Cette rentrée des classes s’est passée dans la joie », tels étaient les propos du ministre Blanquer qui se voulait rassurant et affirmait que les élèves étaient peu porteurs du Covid.
Toutefois, alors que les cas de covid sont passés sous silence grâce à une modification opportune du protocole, les chefs d’établissements se démènent pour préparer un éventuel reconfinement. Pour le moment ils essayent d’imposer aux collègues le distanciel et le présentiel : plus de 30 élèves dans une classes avec des masques pas toujours pris au sérieux, et le soir l’obligation de fournir aux élèves absents l’intégralité du cours.
Que l’on fournisse le cours à des élèves absents pour une durée longue est possible. En revanche, cette demande incessante de parents (via l’ENT) pour une absence d’une journée n’est pas acceptable car les enseignants n’en ont tout simplement pas le temps.

Autre idée dans l’air du temps : les réunions de bonnes pratiques numériques qui sont censés faire émerger un mode opératoire commun chez les collègues.
Que l’Éducation Nationale favorise les logiciels sécurisés et internes, rien de plus normal. Que l’EN cherche à limiter les logiciels pour que les parents ne s’arrachent pas les cheveux est une bonne chose. En revanche, cette réunion cache une volonté beaucoup plus pernicieuse. Sans tenir compte le moins du monde du manque de moyens criants de certains élèves, du manque de connexion dans les zones rurales, du coût d’équipements pour les collègues ou des problèmes liés au fait de passer 8 heures par jour sur un écran, les chefs d’établissements demandent aux enseignants ayant des compétences de former leurs collègues (contre HSE sonnantes et trébuchantes) afin que rien n’empêche le bon déroulement des cours en distanciel en cas de nouveau confinement.

Derrière les discours rassurants et les mensonges éhontés, M. Blanquer se prépare à reconfiner tout ou partie du territoire. Que les collègues ne soient pas des spécialistes d’informatique (ils n’ont pas été recrutés pour ça !) ne pourra pas entrer en ligne de compte car ils auront eu une formation de quelques heures afin de se préparer. Et qu’importe si les élèves n’arrivent pas à envoyer un mail ou à se connecter au cahier de texte de l’ENT avec leur téléphone ou leur ordinateur dépassé, leur crédit limité ou leur réseau internet déficient. L’important est que les collègues seront mis devant le fait accompli : une pseudo formation pour pallier leurs difficultés, des promesses d’aides d’équipement qui ressemblent à une arlésienne et on comptera encore sur leur dévouement professionnel pour pallier à celles de leurs élèves.
Les collègues sont une nouvelle fois l’otage d’un ministre qui ne dit pas la vérité, annonce une situation idyllique tout en laissant les équipes se préparer au pire : un emplâtre sur une jambe de bois.

Matthieu Henner



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